Loi Climat et passoires thermiques : la fin de l’investissement dans le logement ?

Logement
L'investissement dans le logement, victime de la lutte contre les passoires thermiques ?

L’investissement dans le logement est-il en danger ? Le retrait du marché locatif des logement voraces en énergie risque de poser de sérieux problèmes à leurs presque 5 millions d’occupants. À l’heure où les mesures de la loi Climat commencent à s’appliquer, de nombreux propriétaires se demandent encore comment réagir et certains pensent se retirer de l’investissement locatif devenu trop couteux.

 

Des logements interdits à la location

La loi Climat et Résilience commence à s’appliquer et ce n’est que le début.  Au gel des loyers depuis le début de l’année 2022 et à l’obligation de réaliser un couteux audit énergétique en cas de vente, s’ajoute la progressive interdiction de louer ces logements.

Certes, l’interdiction à la location n’est, dans les textes, pas possible. En revanche, ces logements ne seront plus considérés comme « décents » au regard de la loi. En conséquence, les agents immobiliers ne pourront plus les proposer à la location. Le locataire sera en droit de saisir la commission départementale de conciliation, ou même le tribunal. Le bail ne peut être remis en cause dans ce cas. Le juge peut imposer des travaux au propriétaire. Il pourra également décider de réduire le montant du loyer, voire le suspendre complètement jusqu’à la réalisation des rénovations.

A tout seigneur tout honneur, ces mesures toucheront  :

  • dès le 1er janvier 2023 les logements les plus énergivores, dont la consommation annuelle dépasse « 450 kilowattheures d’énergie par m2 et par an ». Elles ne pourront plus être mis en location dans le cadre d’un nouveau bail.
  • Au 1er janvier 2025, interdiction de location des logements de classe G, même pour un renouvellement de bail.
  • Au 1er janvier 2028 : interdiction de location des logements F dont la consommation oscille de 331 à 450 kWh/m2 ;
  • 1er janvier 2034 : interdiction de location des logements E dont la consommation varie de 330 à 231 kWh/m2 par an

A terme, ces mesures concernent 4,8 millions de logements selon le ministère de la Transition énergétique.  Le gouvernement, pour respecter ses objectifs environnementaux, veut atteindre un parc locatif « bas carbone en 2050 ». Une fausse bonne idée ?

 

Le manque d’information des propriétaires

En interdisant la mise en location, le gouvernement cherche clairement à inciter les propriétaires à faire des travaux. De fait, des mesures ont été prises dans ce sens : augmentation des plafonds pour bénéficier de l’aide Ma Prim’Renov ; ouverture d’un service unique d’information et d’accompagnement, France Renov.

Et pourtant, la mesure ne passe pas si bien. Selon une enquête menée par le site pap.fr, 30,5 % des propriétaires de logement locatifs ne sont même pas au courant de l’interdiction de location des logements au DPE classé G à compter de 2023. 40 % ignorent que les logements classé E au DPE ne seront plus éligibles à la location à compter de 2034.

Concernant les travaux, indique l’enquête de pap.fr, 60% des propriétaires de logement classés F et G ne savent pas à combien pourraient s’élever les travaux de rénovation énergétique. 72% ne se sont pas renseignés sur les aides existantes.

 

La loi Climat, la fin de l’investissement dans le logement ?

Quels sont les risques pour l’investissement dans le logement ? D’une part, l’inertie des propriétaires. En effet, si les agents immobiliers ne peuvent plus proposer les appartements indécents en location, les propriétaires eux peuvent toujours les proposer entre particuliers.

C’est d’ailleurs l’un des motifs d’inquiétude des parlementaires de l’opposition qui fustigent une loi en trompe-l’œil. Les locataires de logement insalubres, victimes des marchands de sommeil, savent-ils seulement qu’ils peuvent saisir une commission de conciliation ? Et qui, parmi eux oserait saisir la justice pour obliger le propriétaire à réaliser des travaux ?

Mais plus inquiétant encore, c’est le risque de voir ces logements disparaitre du marché. 32% des propriétaires songent à se retirer de l’investissement locatif. La location, victime de la loi Climat ? Nombre de propriétaires en tout cas ne veulent plus faire face à leurs obligations, indique pap.fr. En témoigne la mise sur le marché de ces logements. Le nombre de logement classés F ou G a bondi de 72%  à Paris ; 74% à Rennes et pas moins de 70% à Nantes entre septembre 2020 et octobre 2021 indique une étude de Que Choisir. Ce qui entraine mathématiquement une baisse des prix.

 

Investisseur, le logement n’a pas dit son dernier mot

On peut voir le verre à moitié vide… ou à moitié plein.  L’investissement dans le logement pourrait connaitre une nouvelle jeunesse. Pour ceux qui souhaitent se lancer investir dans des logements et réaliser une plus-value.  L’urgence est telle que, face à cet afflux de biens sur le marché, les investisseurs pourront négocier les prix à la baisse. Une fois le bien acquis, ils pourront également profiter des aides et de l’accompagnement de France Renov pour réaliser les travaux. Leur bien gagnera donc en valeur et il leur sera plus facile de les louer.

Les locataires peuvent aussi bénéficier indirectement de ces mesures. Les passoires thermiques ont un bilan carbone lourd. Difficiles à chauffer en hiver et à rafraichir en été, elles coutent cher en énergie à leurs occupants, en plus d’un bilan carbone particulièrement élevé. Ce sont ces logements qui sont à l’origine de la précarité énergétique des foyers plus modestes. La rénovation fera augmenter le loyer. Mais la facture énergétique, elle, se trouvera considérablement allégée. Selon les estimations,  un logement de classe G a une facture énergétique de 2 500 € annuels. Un logement classé D, en revanche, oscille entre 751 € et 1 150 € par an. La loi Climat serait-il le meilleur moyen de lutter contre la précarité énergétique ? C’est en tout cas son objectif !

 

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Crédit photo : Samuel McGinity