Propriétaire bailleur, quel est votre régime fiscal ?

Juridique
propriétaire bailleur, quel régime fiscal vous convient le mieux ?

Heureux propriétaire bailleur, quel régime fiscal est le plus avantageux pour vous ? Que vous pensiez réaliser un investissement locatif ou que vous veniez d’acheter un appartement pour le louer en colocation, il est grand temps de vous pencher sur la question de votre régime fiscal. Loueur en meublé ou en location nue, BIC réel, micro BIC, revenus fonciers ou micro-foncier ? Quelles sont les différences, les avantages, les inconvénients ? Les réponses de Christine Chiozza Vauterin, avocat fiscaliste à Paris.

 

Statut fiscal : au choix du propriétaire bailleur

COOLOC: Quel est le meilleur statut fiscal pour un propriétaire bailleur dans le cadre d’un investissement locatif ?

Christine Chiozza Vauterin : En matière d’immobilier, si vous louez un appartement nu, sans aucun meuble, vous êtes imposé dans la catégorie des revenus fonciers. Si vos revenus locatifs sont inférieurs à 15 000 € bruts annuels vous serez imposé en micro-foncier. Au-delà de ce montant ou sur option vous serez imposé au réel dans la catégorie des revenus fonciers. Vous renseignez votre déclaration d’impôts, et, en fonction de vos revenus, un taux spécifique s’applique.

Dans le cadre d’une location meublée, il n’est plus question de revenus fonciers, mais de bénéfices industriels et commerciaux ou BIC. Vous serez loueur en meublé professionnel ou non professionnel en fonction notamment du montant des recettes annuelles et du montant de vos autres revenus professionnels. La différence de statut a des conséquences notamment sur l’imposition de la plus-value au moment de la vente du bien.

 

Micro BIC ou BIC au réel

Il existe deux régimes : micro BIC ou BIC au réel.

Avec le micro-BIC, vous déclarez le montant brut des revenus perçus. Et vous bénéficiez d’un abattement de 50% sur ce montant. Cela vous concerne, de droit, si vous percevez des revenus inférieurs à 70 000 € par an.

Si vous percevez des montants annuels supérieurs à 70 000 €, vous relevez du régime BIC au réel. Sachez que, même si les revenus perçus sont inférieurs à 70 000 €, vous pouvez également opter pour le régime réel.

La question mérite d’être posée : les avantages fiscaux varient entre les deux régimes.

Avec le micro BIC, vous bénéficiez d’un abattement de 50%. Mais les 50% restants sont toujours imposables.

Au régime BIC réel, s’appliquent des règles comptables relevant d’une activité économique et commerciale. Elles vont s’immiscer dans ce régime particulier pour vous permettre d’amortir l’investissement immobilier ainsi que le mobilier.

 

Concrètement

Prenons un exemple simplifié :  vous achetez un appartement de 400 000 € pour le louer. Le montant amorti représente environ 80% du total (le taux est déterminé par un expert comptable). On enlève la partie correspondant au terrain qui n’est pas amortissable, on ne garde que l’immeuble qui représente 80% de l’investissement. Vous pouvez déjà amortir 280 000 €.

Au cours de la durée d’amortissement de cet immeuble – entre 30 et 40 ans, là aussi la durée de l’amortissmeent est donné à titre indicatif et doit être validé par un expert comptable -, vous allez pouvoir, tous les ans, imputer sur les revenus perçus un montant d’amortissement ou le reporter sur les revenus à percevoir les années suivantes. Cette ligne de charge d’amortissement vient réduire d’autant votre revenu imposable.

Au BIC au réel, les revenus perçus sont les loyers. Vous pouvez en déduire non seulement l’amortissement de l’immobilier et du mobilier – mais aussi  toutes les autres charges classiques :

  • les intérêts d’emprunt si vous avez acheté par emprunt et l’assurance y afférent ;
  • les assurances si vous en avez souscrites une sur le bien loué ;
  • certaines charges de co-propriété ;
  • les travaux réalisés ;
  • éventuellement la taxe foncière ;
  • vous pouvez également amortir le mobilier. Par exemple, si vous achetez pour 15 000 € de meubles (cuisine, canapé, frigidaire), ils peuvent être amortis en 5-10 ans.

Ce régime est plus complexe car il s’agit de règles fiscales et comptables. Vous aurez donc besoin d’un expert-comptable pour vous accompagner et déterminer les éléments amortissables et les durées d’amortissement.

 

Un régime plus intéressant pour le propriétaire bailleur

COOLOC : Pour un propriétaire bailleur, quel régime serait plus intéressant ?

Christine Chiozza Vauterin : Pour un propriétaire bailleur, il est a priori fiscalement plus intéressant de choisir le régime BIC réel. Il vous permet d’imputer en amortissement une part importante de l’achat, qui réduit donc le revenu imposable. En micro BIC, en revanche, vous aurez toujours un montant minimum imposable.

Le régime réel vous permet éventuellement d’être en déficit les années où vous avez  plus de charges que de revenus. Vous serez donc en déficit BIC, ce qui signifie que vous n’aurez pas de revenu imposable. Et ce déficit est reportable sur les revenus des années suivantes.

Si un propriétaire bailleur achète un bien meublé et choisit le régime BIC réel, il peut également déduire les frais de notaire, les droits de mutation, les frais d’agence… Ces charges sont déductibles et vont créer un déficit reportable les années suivantes jusqu’à épuisement.

Vous pourrez donc pendant plusieurs années percevoir des revenus, peu ou pas fiscalisés.

 

A une condition cependant

Il y a cependant un bémol. Il s’agit d’une réelle activité relativement complexe dans son régime fiscal et comptable. Le propriétaire bailleur doit être actif. Il doit prendre attache auprès d’un expert-comptable. Le propriétaire doit aussi déclarer son activité de location meublée auprès du tribunal de grande instance du lieu d’exercice de cette activité pour obtenir un numéro Siret. Enfin, il ne faut pas y voir uniquement une fiscalité avantageuse. C’est une activité industrielle et commerciale qui implique le respect de règles et obligations.

Lorsque l’on est en BIC au réel, il faut être organisé et proactif : le propriétaire bailleur doit garder toutes ses factures, les charges payées, les factures pour le mobilier remplacé, les travaux réalisés… comme pour n’importe quelle activité commerciale.

Le propriétaire bailleur peut aussi confier la gestion de son bien à une agence spécialisée. Autant de frais supplémentaires mais qui sont également déductibles du revenu.

 

Loueur en Meublé Non Professionnel (LMNP) ou Loueur en Meublé Professionnel (LMP) ?

Le régime micro BIC convient mieux au propriétaire bailleur qui ne veut pas se compliquer l’existence avec un ensemble de déclaration et de formalités. Et qui souhaite remplir simplement sa déclaration d’impôt.

 

COOLOC : Dans quel cas le propriétaire bailleur doit se déclarer en Loueur Meublé Non Professionnel ou en Loueur Meublé Professionnel ?

Christine Chiozza Vauterin : Le statut professionnel ou non professionnel dépend de plusieurs critères et notamment du montant des revenus tirés de cette activité. Vous serez Loueur Meublé Non Professionel ou LMNP si :

  • ces revenus représentent moins de 23 000 € par an ( soit 1 900 € de loyer mensuel) ;
  • et qu’ils ne représentent pas plus de 50% de tous vos autres revenus professionnels.

Au-delà de ces seuils, vous passez en professionnel. En colocation, il suffit que vous ayez un grand appartement accueillant plusieurs colocataires, vos revenus annuels seront rapidement supérieurs à 23 000 €.

La plupart des Loueurs en Meublé Non Professionnels ont investi dans l’immobilier pour obtenir des revenus complémentaires. Ils ne souhaitent pas pour autant en faire une activité principale. En cas de cession, la plus-value immobilière réalisée reste dans le régime des plus-values privées. Dans ce cas, vous bénéficiez d’un abattement pour durée de détention. Vous pouvez même être exonéré d’impôt sur les plus-values immobilières au bout de 22 ans de détention et 30 ans de rétention pour les prélèvements sociaux.

Si vous êtes Loueur Meublé Professionnel ou LMP, votre plus value est imposable avec un taux d’imposition plus élevé. Même si certains cas d’exonération existent, ils ne s’appliquent pas toujours.   

 

Des changements pour les LMP

De plus, concernant les LMP, les choses ont récemment changé. Avant, pour être loueur professionnel, il fallait remplir trois conditions :

  • s’inscrire au registre du commerce et des sociétés ;
  • disposer de plus de 23 000 € de revenus issus de la location ;
  • qui devaient être supérieurs aux autres revenus professionnels du foyer fiscal.  

Les propriétaires bailleurs qui ne voulaient pas être qualifiés de professionnels ne s’inscrivaient pas au registre du commerce et des sociétés. Cette condition n’existe plus. Elle a été annulée par le Conseil Constitutionnel en février 2018. Pour autant les textes de loi n’ont pas encore été modifiés de manière satisfaisante.

Donc qu’est-ce qui s’applique ? Selon moi, la décision du Conseil Constitutionnel l’emporte. Mais comment traiter les situations antérieures à février 2018 ? C’est un sujet d’actualité un peu complexe en raison des conséquences fiscales différentes.

 

Propriétaire bailleur … et colocataire

COOLOC : Dans le cas d’un propriétaire bailleur qui loue une ou plusieurs chambres dans le logement qu’il habite, de quel régime fiscal dépend t-il  ?

Christine Chiozza Vauterin : S’il est en micro BIC, il est toujours imposé sur 50% de ses revenus.

Au régime des BIC au réel, il peut bénéficier sur plusieurs années de l’impact de l’amortissement et même avoir des déficits. Et donc pendant plusieurs années, ne pas avoir de revenus imposables.

Fiscalement, le micro-BIC n’est pas plus intéressant, sauf lorsque les charges sont inférieures à 50 % des revenus, mais dans tous les cas plus confortable. Il s’agit juste d’une case à remplir dans sa déclaration. Il n’y a pas de comptabilité des dépenses et charges à suivre de près.

Le fait pour le propriétaire bailleur d’habiter le même logement ne change rien. Cela reste des BIC à partir du moment où la chambre est meublée.

 

Location meublée ou une location nue ?

COOLOC : Vaut-il mieux une location meublée ou une location nue ?

En location nue, vous ne pouvez pas déduire autant de charges de vos revenus fonciers qu’en location meublée. Par exemple les frais de notaire, les frais d’agence, les droits de mutation ne sont pas déductibles en revenus fonciers. Or il s’agit d’un poste de dépense important lors de l’investissement. .

Ce n’est pas le cas en location meublée où plus de charges sont déductibles. Mais n’oubliez pas qu’un décret a listé l’ensemble des meubles que vous devez fournir en location meublée.

Rappel très important : la fiscalité applicable aujourd’hui ne sera peut être pas la fiscalité applicable demain. En effet en matière fiscale les régles évoluent et changent très souvent, il faut donc faire attention, s’entourer de conseils et ne jamais réaliser un investissement dans un objectif uniquement fiscal. 

Christine Chiozza-Vauterin est avocate inscrite au Barreau de Paris. Elle est spécialisée en fiscalité personnelle et patrimoniale depuis plus de 15 ans.

Pour tout savoir sur les aspects contractuels et légaux de la co-location, consultez la rubrique “Juridique” du blog de COOLOC. 

Et inscrivez-vous à la newsletter pour ne rien rater de l’actualité de la co-location !

 

Crédit photo : Samuel McGinity