Manque-t-il des logements en France ?
La France manque-t-elle de logements ? La crise de l’immobilier est-elle inéluctable ? Faut-il construire plus de logements ? D’autres solutions sont-elles possibles ?
Des besoins liés à des régions spécifiques
Il manquerait près de 57 000 logements sur ces 20 dernières années, selon l’étude du cabinet Astéres, commandée par le groupe Emeria. Mais les besoins ne sont pas uniformément répartis sur le territoire. L’Île-de-France, avec 50 000 nouveaux habitants par an, et les Hauts-de-France auraient besoin de 64 000 logements. Au contraire, la Bretagne, les Pays de la Loire ou la Nouvelle-Aquitaine ont un excédent de plusieurs milliers de logements.
Rien d‘étonnant donc à ce que louer un logement devienne de plus en plus compliqué pour 76,4% des candidats, notamment étudiants, employés en CDD, free lance sommés de se munir de multiples garanties.
L’effet de concurrence joue également. En Bretagne ou sur la côte basque, entre les résidences secondaires et les logements dédiés aux locations type Airbnb, il reste moins de place pour la location à long terme.
La construction, seule réponse face au manque de logements ?
La solution réside-t-elle dans la construction de nouveaux logements ? Pas nécessairement. Selon le cabinet Asterès, 500 000 permis de construire pour des logements neufs ont été délivrés entre mai 2021 et avril 2022. En un an, 400 000 logements ont été mis en chantier. De quoi relativiser la crise ?
La situation n’est pas si simple. Selon une étude de l’Institut des Hautes Etudes pour l’Action dans le Logement (Idheal), 1% des communes sont à l’origine de 40% des constructions de logement ces 10 dernières années. 60% ont construit moins de 4 nouveaux logements par an. 350 communes, dont Toulouse, Lille, Dijon ou Saint-Denis ont mis en chantier 1 335 912 logements sur les 3 365 088 construits dans toute la France. Mais la construction prend du temps et reste couteuse. L’inflation frappe violemment le secteur. Or les besoins sont pressants.
Des voix se sont élevées pour réclamer la réquisition des logements vacants. Asterès estime qu’il y a près de 3 millions de biens vides. Mais, selon le cabinet, la vacance est trop courte pour envisager la mise en location des biens. Les résidences secondaires, elles, sont situées dans des zones rurales ou touristiques. La plupart d’entre elles sont trop éloignées des zones de tension pour pallier le manque de logements.
Une meilleure répartition de la demande
Sur les marchés en tension, les prix s’envolent. Il faudrait mieux répartir la demande. Comment ? En rendant les villes moyennes attractives. C’est l’objectif du plan Action Cœur de Ville qui accompagne les villes dans l’amélioration des infrastructures (transports, services publics…) C’est d’autant plus important que les villes moyennes attirent depuis des années. Le nombre de ventes augmente ( +17% en 2018, + 12% en 2020) observe un baromètre de l’Agence nationale de la cohésion des territoires et du Conseil supérieur du notariat. C’est le cas de Perpignan qui a vu ses prix augmenter de 20% en 1 an.
Crise du logement ou crise du mal logement ?
Non seulement il manque des logements dans certaines zones, mais une partie de ceux qui existent posent problème.
La fondation Abbé Pierre parle de 4 millions de mal-logés en France rappelait Véronique Bédague, Directrice générale de Nexity au micro de BFM Business. « Et on a les nouvelles réglementations thermiques qui font qu’une partie des appartements possédés par des particuliers ne seront plus louables à partir de 2025 si les travaux ne sont pas faits. On estime qu’il y a à peu près 1,5 million de logements qui ne pourront pas être reloués. On parle de travaux de l’ordre de 20, 30, 50 000 € mais ce n’est pas si facile que ça pour un retraité qui a un petit revenu de faire ces travaux. »
Il est pourtant nécessaire de les réaliser et à plus d’un titre. Avec l’arrivée de l’hiver et la crise énergétique, le problème des passoires thermiques se pose de façon accrue. Sur les 7,2 millions d’habitations peu ou pas isolées en France, 5,2 millions sont des résidences principales, soit 17 % du parc immobilier. Et elles coutent cher à leurs habitants : entre 600 et 1 400 € de plus que dans une demeure rénovée, indique une étude de 2020. Sans compter un bilan écologique désastreux : ces logements rejetteraient 6 millions de tonnes de CO² dans l’atmosphère chaque année.
Quelles solutions face au manque de logements ?
Selon Loïc Audet, la construction de nouveaux logements n’est pas l’unique solution. Il faut également se concentrer sur l’existant. Rénover est plus rapide et a un impact moindre sur l’environnement que construire du neuf. De plus, ces logements se situent souvent à proximité du centre-ville. Cela signifie réduire les temps de trajets – et donc la pollution – et se rapprocher des services.
Est-il possible d’augmenter le nombre de logements dans l’ancien ? Bien sûr. « Par exemple en surélevant le mobilier existant, ou encore en transformant des bureaux inutilisés en logements. Mais, remarque Loïc Audet, les contraintes administratives sont un frein majeur à la rénovation. Il faut aujourd’hui prévoir une place de parking par logement neuf. Or en centre-ville, c’est impossible. Quand au coliving, l’administration voit les opérateurs comme des marchands de sommeil. Ou alors, elle estime qu’ils ont opéré une division sauvage d’un logement sans autorisation. Nous devons être pédagogues pour expliquer aux pouvoirs publics l’intérêt du coliving. C’est un projet qui, indirectement, subvient aux besoins de logements, ce qui est top pour les grandes villes. Et cela permet d’utiliser au mieux les parties communes et les parties privatives. »
Un avis largement partagé par COOLOC et sa fondatrice, Virginie Perret : « La colocation et le coliving permettent de créer des logements sans construire. On peut rénover les passoires thermiques pour les remettre sur le marché et répartir les ressources et les charges entre les colocataires. » Pallier le manque de logements en France passerait donc par de nouvelles façons d’habiter … et de vivre ensemble.
Pour tout savoir sur les tendances de la co-location, consultez la rubrique “Logement” du blog de COOLOC. Et inscrivez-vous à la newsletter pour ne rater aucun article !
Crédit photo : Samuel McGinity