Créer une colocation pour seniors, pourquoi ça marche ?

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pourquoi créer une colocation pour personnes âgées ou seniors ? ce qui marche

Les colocations pour seniors se multiplient en France. Pas étonnant ! C’est une réponse efficace au manque de structures adaptées pour une population vieillissante. La lutte contre l’isolement passerait-elle par des cohabitations entre seniors ? Toujours est-il que vivre ensemble leur permet de lutter contre leur isolement. La cohabitation leur assure une vie aussi autonome que possible… Partager les charges n’est pas non plus négligeable en cas de petite retraite.

 

De moins en moins d’EHPA, de plus en plus d’EHPAD

Ce n’est pas une nouveauté. Le nombre de personnes âgées s’accroît note l’Insee dans son tableau de l’économie française. Et notamment le nombres de personnes âgées dépendantes. Par conséquent, le nombre de places en EHPAD (Établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes) ne cesse d’augmenter. Fin 2016, l’INSEE dénombrait 605 000 places d’accueil contre 7 900 en EHPA (Établissement d’hébergement pour personnes âgées).

Depuis 2016, le nombre de places dans ces derniers décroit en moyenne de 6,2%. Le nombre de places en EHPAD, lui, est en augmentation régulière (+ 2,7 % par an sur la même période). Progressivement, les EHPA et les unités de soins de longue durée (USLD) se transforment en EHPAD.

Si la prise en charge des seniors dépendants est plutôt bien assurée, qu’en est-il des personnes âgées encore autonomes ?

 

Des alternatives à taille humaine

L’isolement guette en effet les seniors qui, moins actifs, ne vivent pas toujours à proximité de leur famille. Les colocations pour seniors naissent d’ailleurs souvent de cette prise de conscience. Certains seniors, constate Emmanuelle Gérard, aide-soignante de Mayenne, « arrivent en institution alors qu’ils sont encore autonomes. C’est dommage ». « On voit trop d’anciens se dégrader chez eux à cause de la solitude. Et je pense que ça rassure les familles de ne pas les savoir seuls » ajoute son mari, Pierre Lecourt. Pour aider les seniors encore autonomes à vivre leur vieillesse dans de meilleures conditions, ils ont donc racheté une maison adaptée aux personnes à mobilité réduite dans leur village pour y organiser une colocation de personnes âgées.

Pour Anne-Lise Meunier, jeune assistante sociale libérale en Seine-et-Marne, c’est apparu comme une évidence. « Quand on avance dans l’âge, on n’a pas toujours le sentiment d’être utile et on se sent mis parfois à l’écart. C’est cela que je veux briser. » Dans le grand corps de ferme à 8 km de Montmirail dont elle est propriétaire avec son compagnon, elle souhaite « rompre l’isolement, remettre l’humanité au centre de nos préoccupations, rendre un air de famille aux personnes seules ». Le jeune couple a donc décidé de transformer une partie des bâtiments en quatre logements autonomes destinés à des locataires de plus de 60 ans.

 

Des colocations pour seniors en perte d’autonomie

L’avancée en âge pouvant rimer avec dépendance, certaines colocations sont pensées spécifiquement pour les personnes âgées en perte d’autonomie. En Ardèche, à proximité d’Aubenas, la Ravigote accueille des personnes âgées et dépendantes et des handicapés. Le nom de la maison est déjà tout un programme. Ravigoter signifie en effet redonner de la vigueur, de la force. A l’origine de ce projet, Françoise, Olivier et Christiane, professionnels du domaine médico-social, ont d’abord cherché à recréer un contact humain avec les colocataires, des personnes âgées ou handicapées.

Olivier, ancien éducateur et responsable de centre social regrettait l’évolution de son métier. Depuis vingt ou trente ans, « on a plus que 20 % de temps de travail avec le public, tout le reste, c’est remplir des papiers. » Pour Christiane, aide-soignante, le rythme imposé par l’institution – incompatible avec les besoins des personnes aidées- lui a donné envie d’exercer son métier autrement. Ils ont donc opté pour une solution radicale :  accueillir chez eux ces locataires en perte d’autonomie pour partager le quotidien et créer le meilleur environnement possible afin de les remettre sur pied. Pour Christiane, l’une des aides-soignantes qui vient chaque semaine donner des soins est enthousiaste, c’est devenu une aventure humaine avant d’être un travail. « On a rencontré des gens formidables, c’est un échange permanent.« 

 

Des maisons adaptées aux besoins des locataires

Trouver l’équilibre entre les besoins des habitants, c’est le secret de ces colocations nouvelle génération ! La Ravigote accueille des colocataires en perte d’autonomie, mais la maison préserve leur intimité. Les chambres, qui disposent toutes d’une salle de bain privée, sont de plain-pied pour faciliter les déplacements. Elles ont souvent un accès direct sur l’extérieur afin de permettre aux colocataires de circuler librement.

C’est le même principe dans les colocations dédiées aux seniors en perte d’autonomie gérées par Age et Vie. Les maisons n’accueillent pas plus de 8 colocataires. L’organisation du logement est toujours la même : une  pièce de vie de 80 m2 avec salon, cuisine et salle à manger, autour de laquelle se répartissent 8 chambres de 30 m2, avec salle de bains. Ces dernières sont toutes de plain-pied, avec baie vitrée et un accès indépendant. 

 

Et conçues pour favoriser leur bien-être

« Elles peuvent venir y vivre avec leurs meubles, leurs objets, leur déco, mais aussi leur animal de compagnie. Elles sont chez elles. Et c’est aussi possible d’y venir en couple » explique le porte-parole du réseau Âges &Vie.

Ces maisons sont faites « pour leur redonner de l’autonomie et les stimuler » poursuit-il. Les personnes âgées sont ainsi incitées à préparer les repas. Elles peuvent aussi mettre le couvert, participer au ménage, au repassage et au jardinage et autres activités du quotidien.

A la Fourmilière, la colocation d’Emmanuelle et de Pierre, c’est la liberté de chacun qui prime. « Chacun se lève quand il veut, mange quand il veut… Ils seront chez eux, mais avec l’avantage de la compagnie. Et de l’entraide aussi. Chacun pourra apporter ses compétences au sein de la maison. »

 

Développer la vie autour de la colocation

Dans les logements d’Age et vie, deux auxiliaires de vie habitent également sur place avec leur famille. Le moyen de favoriser les échanges intergénérationnels.

Un aspect qui motive également Anne-Lise, son compagnon Bruno, parents d’un petit Esteban. « Nous allons partager une sorte de vie de famille avec nos locataires. Esteban sera l’enfant le plus heureux du monde puisqu’il aura plein de papis et de mamies pour faire des beaux sourires. Et je ne doute pas un instant que la présence de mon fils, qui sourit en permanence, ne va pas repousser nos locataires, bien au contraire. »

Elle compte bien également les faire profiter du bonheur de vivre à la campagne. « Nous allons créer un potager dans le terrain et profiter des fruits et légumes maison. Pour les résidents qui le désirent et qui ont toujours aimé jardiner, il leur sera possible de planter ce qu’ils désirent et de récolter leurs produits donnant une joie d’être au plus près de la nature. »

 

La colocation d’anciens… pour rester chez soi

Très répandus en Europe du Nord, les colocations dédiées aux personnes âgées, les habitats partagés et autres béguinages se multiplient aujourd’hui dans toute la France. Certains projets sont même initiés par les seniors eux-mêmes. Il s’agit en particulier des seniors qui ne se retrouvent pas forcément dans les résidences pour personnes âgées, trop standardisées à leur goût.

« Avec deux couples d’amis, à l’approche de la retraite et nos enfants étant installés dans la vie, nous avons envie de vieillir ensemble, profiter de ce que nous sommes encore en pleine forme pour créer un habitat collectif où nous pourrons partager des moments mais aussi des moyens et des charges », explique Philippe Jacquier, galeriste à Montreuil.

D’autres se retrouvent seuls dans un logement trop vaste pour eux. Ils peuvent avoir alors recours à la colocation intergénérationnelle en accueillant un étudiant ou un jeune actif chez eux. Cela rompt la solitude aussi bien de la personne âgée que de l’étudiant, parfois nouveau venu dans une ville inconnue.

Les bénéfices des colocations seniors, comme des colocations intergénérationnelles ne sont plus à prouver. Être bien entouré permet de vivre en bonne santé et plus longtemps expliquent les scientifiques. C’est également le moyen d’économiser sur les charges et les loyers en partageant le cout de la vie. A une époque où la population vieillit, vivre une vieillesse sereine et heureuse est finalement une action d’avenir.

 

Pour tout savoir sur les tendances de la co-location, consultez la rubrique “Témoignages” du blog de COOLOC. Et inscrivez-vous à la newsletter pour ne rien rater de l’actualité de la co-location !

Crédit photo : Samuel McGinity