Les jardins partagés : le retour de l’agriculture en ville

Bons plans
Jardins partagés

On connaissait la co-location, le co-voiturage, on pourra bientôt parler de co-jardinage. L’essor des jardins partagés est une bonne nouvelle pour les citadins jardiniers, pour ceux qui veulent consommer leurs propres fruits et légumes, ou encore pour ceux qui ont la main verte mais qui manquent d’espace dans leurs petits appartements.

 

Quel est le principe des jardins partagés ?

Il s’agit d’une parcelle privée ou publique transformée en espace vert, cultivée et animée par les habitants. Le concept est bien rodé. Rien que dans Paris intra-muros, il en existe plus d’une centaine.

Le jardin partagé permet aux habitants de se retrouver pour cultiver ensemble plantes, légumes, fruits… Outre sa portée écologique, c’est aussi un lieu ouvert sur le quartier. Il permet de recréer du lien social, culturel, intergénérationnel. En témoigne l’ambiance à l’Accueillette au coeur du 9e arrondissement de Paris : « il y a beaucoup de familles avec enfants, mais aussi des mamies qui expliquent aux plus jeunes ce qu’est le serpolet ou la sauge » raconte Laurent Marcoz, président de l’association qui gère ce jardin.

Le dimanche, les habitants s’y retrouvent pour bêcher, désherber, planter. Ils peuvent aussi repartir avec une petite récolte pour leur consommation personnelle.

 

Difficile de mettre en place un jardin partagé ?

Rien de plus facile selon la Mairie de Paris. Il suffit de :

  • trouver une parcelle (espace vert, friche urbaine…) qui peut appartenir à la ville ou à d’autres organismes (Réseau ferré de France, bailleurs sociaux…) ;
  • monter une association avec des habitants du quartier pour porter le projet ;
  • prendre contact avec les correspondants Main Verte (main.verte@paris.fr) qui aident à constituer le dossier ;
  • l’association, la mairie d’arrondissement et les services de la ville de Paris se concertent pour mettre en place le projet.

Les jardins habilités adhérant à la charte de la main verte s’engagent à l’ouvrir au public et à l’entretenir en respectant l’environnement.

Si vous n’êtes pas parisien et envisagez tout de même la création d’un jardin partagé, vous pouvez vous adresser au réseau Le Jardin dans tous ses Etats, qui rassemble les associations de jardins partagés dans la France entière.

L’agriculture urbaine, une réflexion de fond dans la région

Mais les jardins partagés ne représentent que la partie émergée de l’iceberg. Rien qu’à Paris, les initiatives agricoles urbaines se multiplient. On peut manger du miel produit par des ruches placées sur le toit de l’Opéra Garnier, du Musée d’Orsay ou aux Invalides. Depuis peu, du safran est produit à l’institut du Monde Arabe et sur le toit d’un Monoprix. Aussi bien la plantation que la récolte sont ouvertes au public

À plus grande échelle, il s’agit d’une tendance lourde, que reflète l’appel à projet “Inventons le Grand Paris”. Ce projet vise à aménager différents sites plus ou moins abandonnés dans Paris et sa proche banlieue. Lors de sa première édition en 2017, 75 % des propositions intégraient des projets d’agriculture urbaine. ”Il n’existe pas un seul territoire où l’on ne se pose pas ces questions, liées également au thème de la renaturation et du lien avec le périurbain. L’agriculture urbaine se développe partout dans le monde, en même temps que la métropolisation » explique Daniel Breuiller, vice-président de la Métropole du Grand Paris.

 

Paris autosuffisant alimentairement?

Une réflexion pour revenir à une situation antérieure.  Il n’y a pas si longtemps – en 1800 – Paris était autosuffisant alimentairement rappelle le géographe Gilles Fumey.
Et aujourd’hui, le retour de l’agriculture en ville aurait toute sa place : “cela permet de capter du dioxyde de carbone – CO2 – et de rafraîchir les villes. L’agriculture en ville permet également de faire l’économie du transport des denrées, ainsi que de sécuriser les approvisionnements. Il y a aussi un potentiel intéressant en matière d’emplois, en mettant en place de nouvelles filières maraîchères de proximité, au lieu de dépendre de l’Italie ou de l’Espagne et de leur main-d’œuvre esclavagisée.” Aujourd’hui, l’agriculture urbaine emploie environ 1400 personnes réparties sur 110 sites. Outre son objectif alimentaire,  l’agriculture urbaine serait-elle également une arme  pour combattre le chômage ?

Mais même largement développée, elle aurait cependant du mal à nourrir la population parisienne explique Daniel Breuiller. La région ne produit que 2% de sa consommation alimentaire.

 

Se débrouiller : une tradition de l’agriculture urbaine

De plus, aujourd’hui, faire pousser de tout et n’importe quoi à Paris relève du défi en raison du peu de place. Mais cela n’a rien d’un problème neuf. Au XIXe siècle déjà, maraîchers, horticulteurs et éleveurs travaillent sur des parcelles minuscules mais ultra-productives. Ils gavent les sols des engrais naturels : les excréments animaux et humains.

Aujourd’hui, l’Agrocité de Colombes apporte d’autres solutions à ces problèmes. On y trouve à la fois une micro-ferme expérimentale, des jardins partagés, des espaces pédagogiques et tout l’arsenal de la créativité agricole du XXIe siècle : chauffage à compost, collecte et utilisation de l’eau pluviale, énergie solaire, horticulture hydroponique (hors-sol), phytoremédiation (restauration de la qualité des sols par les plantes). En outre, l’Agrocité accueille les habitants qui gèrent le maraîchage, le poulailler et la cantine, et aussi des structures professionnelles et des associations.


Une exposition a même été consacrée à ces “nouveaux terriens” en novembre au Pavillon de l’Arsenal à Paris. Selon Augustin Rosenstiehl, commissaire de l’exposition, «la ville vorace, foisonnante et cosmopolite exhorte ainsi les cultivateurs à s’adapter sans cesse, à se relocaliser alors que s’étend le tissu urbain, en somme à être vifs et inventifs dans un mode agricole global qui peine à sortir de l’immobilisme».

 

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Crédit photo : Samuel McGinity