L’environnement inclusif dessine le monde de demain

Vie quotidienne
environnement inclusif ou comment faciliter le vivre ensemble en dépit des différences

Que ce soit dans les discours ou les articles, l’environnement inclusif est de plus en plus présent. Mais de quoi s’agit-il concrètement ? Du design des objets à la conception des équipements publics, l’environnement inclusif prend en compte la diversité de ses utilisateurs. Y compris s’ils sont handicapés, ou que l’âge risque de rendre leurs mouvements plus difficile…

 

Quand le handicap n’est pas ce que l’on croit…

Le handicap désigne l’incapacité – physique, cognitive ou sociale – d’une personne à évoluer dans son environnement. Quatre catégories de handicap sont d’ailleurs recensées :

  •  Visuel : les personnes atteintes de cécités ou d’un handicap visuel
  • Physique : les personnes à mobilité réduite ou qui ne peuvent pas se servir de leur souris d’ordinateur par exemple
  • Auditif : les personnes qui ont une déficience auditive peuvent avoir des problèmes d’élocution et de compréhension écrite… Ce qui peut poser des problèmes liés principalement aux supports vidéo ou vocaux
  • Cognitif : les personnes atteintes d’une défaillance cognitive tels que le trouble de l’attention, de la mémoire, de la réflexion ou encore de la perception

De plus, le handicap n’est pas forcément permanent. Il peut s’agir d’un handicap temporaire lorsque l’on se casse une jambe ou un bras par exemple – voire situationnel. Un parent qui porte son bébé dans ses bras se trouve limité dans son environnement.

Le handicap désigne donc un phénomène complexe souligne l’Organisation Mondiale de la Santé. Il s’agit de « l’interaction entre les caractéristiques corporelles d’une personne et les spécificités de l’environnement dans lequel il ou elle vit ». Ce dont témoigne la designer Christina Mallon, dans une vidéo devenue virale : ce qui la handicape n’est pas la maladie mais le design des objets du quotidien.

 

L’erreur de la moyenne

Or souvent les handicapés, mais aussi les personnes âgées sont considérées comme ne faisant pas partie de la moyenne. Au contraire, une population normale, rappelle Jean-Claude Sperandio, psychologue de formation et spécialiste de l’Ergonomie, comprend des personnes âgées et très âgée et des personnes handicapées

Or le mythe de la norme, bien que relativement récent, a pourtant la vie dure.  Il est né au cours des années 1800, lorsqu’un mathématicien belge Adolphe Quetelet tente de définir la moyenne d’une population. Pour cela, il a recours à de multiples mesures : tour de poitrine des soldats, la taille moyenne, le poids moyen, l’âge moyen du mariage, et même la moyenne de l’âge de la mort pour les humains. De là, l’idée qu’il existe un humain moyen.

Une idée qui a pu conduire à des situations dramatiques. Ainsi, dans les années 1940, les cockpits des avions de chasse étaient conçus pour l’homme moyen. Or face aux fréquents accidents, les chercheurs ont tenté de déterminer si la conception des postes de pilotage était en cause. On a mesuré plus de 4 000 pilotes. Pas un seul ne correspondait aux mesures moyennes selon lesquelles étaient fabriqués les cockpits. Les avions ont donc été redessinés pour s’adapter aux extrêmes et les crashes se sont arrêtés.

Morale : c’est sa diversité qui caractérise une population. Et c’est ce que doivent garder à l’esprit les concepteurs, sous peine d’exclure de fait un grand nombre d’utilisateurs potentiels.

 

L’objectif de l’environnement inclusif : connaître les besoins des utilisateurs

De fait, les entreprises réagissent. La plupart ont renoncé à imaginer leur client moyen au profit des « personas ». Il s’agit de personnages fictifs dotés d’attributs et de caractéristiques sociales et psychologiques , censées représenter un groupe cible. L’idée est de personnaliser au maximum les typologies de clients pour connaître leurs réactions et leurs besoins.

D’autres entreprises n’hésitent pas à envoyer leurs équipes sur le terrain, voire les poussent à se mettre elles-mêmes dans la peau de leur cible potentielle. Patricia Moore  designer spécialisée dans les besoins des personnes âgées, a ainsi passé des années à voyager aux États-Unis déguisée en femme de 80 ans pour comprendre les défis auxquels font face les personnes âgées. Elle en a tiré la conviction que le design est avant tout un moyen de permettre aux gens de garder leur indépendance dans toutes les situations.

C’est d’ailleurs l’objectif du design inclusif qui permet de faire un pas de plus vers le vivre ensemble. Empathie et expérimentation permettent de prendre en compte la diversité des individus et donc de les comprendre.

 

Le design inclusif fait des contraintes une source de créativité

De la  machine à écrire aux portes automatiques en passant par les lunettes de soleil, nombre de produits ou équipements conçus à l’origine pour des personnes handicapées sont d’usage courant.

Facilitant la vie des handicapés, elles améliorent fortement celle des gens sans handicap. Ainsi, disent les spécialistes, le design inclusif donne une vie normale aux personnes handicapées et améliore celle des personnes sans handicap. Les livres audio par exemple destinés au départ pour les malvoyants sont maintenant utilisés par les élèves en difficulté, voire par les conducteurs qui agrémentent ainsi de longs trajets seuls en voiture.

Que dire encore de la télécommande, conçue pour que les personnes à mobilité réduite puissent facilement changer de chaine. De même l’assistant vocal de votre téléphone doit sa naissance aux personnes qui ne peuvent utiliser le clavier de leur portable.

L’environnement inclusif doit donc tendre à devenir la norme. Pour Pierre Lainé, UX Designer, il « doit être un élément obligatoire dans le processus de réflexion de tout UX et UI Designer. Avant d’imaginer des fonctionnalités complexes pour vos interfaces, il est facile d’intégrer des éléments qui en faciliteront l’usage et la compréhension pour les rendre plus accessibles… : une typographie adaptée, un contraste suffisant pour tous les terminaux …ou encore l’optimisation des formulaires (gestion de l’erreur, aide au focus etc.). Ces premières bases acquises, vous pourrez ainsi pousser la conception inclusive pour offrir à vos utilisateurs une expérience exceptionnelle. »

Car pour les entreprises, l’inclusion représente un formidable marché rappelle Cristina Mallon : « Une personne sur 5 en moyenne dans le monde souffre de handicap. Or ce sont des gens qui ont de l’argent : 7 000 milliards €, dit-elle. Trop peu de marques aujourd’hui se penchent sur le handicap, soit dans leurs produits soit dans leurs publicités. »

 

Un environnement inclusif pour faciliter le vivre ensemble

Sans compter qu’un environnement inclusif offre de nouvelles possibilités à ceux qui portent l’étiquette de handicapés. Ainsi, à Nantes et à Paris, les restaurants Le Reflet dont les employés sont porteurs de trisomie 21 sont conçus pour permettre à ces derniers de travailler en toute sécurité : plus d’espace entre les tables, assiettes conçues pour une meilleure prise en main… Des détails mais qui permettent de donner un travail à ceux trop souvent exclus du marché de l’emploi.

Le design inclusif est donc une mine : non seulement il ouvre des possibilités inexplorées pour un produit. Mais à l’époque du vivre ensemble, c’est aussi un moyen de se rapprocher de l’autre en dépit des différences…

 

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Crédit photo : Samuel McGinity