Loyer impayé : vers une nouvelle crise ?

Après les crises sanitaire et économique, la prochaine crise pourrait être sociale. Elle pourrait se focaliser autour des locataires et de leur loyer impayé.
Un risques de loyer impayé en hausse !
Avec le confinement, les revenus baissent. Or les loyers et dépenses fixes ne disparaissent pas pour autant. Plus de 4 millions de ménages sont soumis à cette double contrainte budgétaire notait l’INSEE en avril dernier. Parmi eux, 2,5 à 2,8 millions sont probablement en difficulté, ce qui représenterait 6 à 7 millions de personnes.
Les dépenses fixes de logement ne cessent d’augmenter avec les années. C’est aujourd’hui le premier poste de dépenses de 20% des ménages les plus modestes. Ils sont en effet plus souvent locataires que les ménages plus aisés. La crise actuelle n’y change rien. En cas de clause de révision dans le bail, les propriétaires peuvent, suivant l’IRL – l’indice de référence des loyers – augmenter les loyers de 0,46%.
Les ADIL (Agences départementales pour l’Information sur le logement) ont donc mis en place un baromètre des loyers impayés. « Pour l’instant, on observe une hausse des chiffres par rapport à 2019 », explique Louis Du Merle, directeur du pôle juridique. Aux mois d’avril et de mai, les appels de locataires du parc privé aux Adil avaient doublé. Les locataires anticipaient un impayé de loyer, avant même les relances des propriétaires.
Du côté des propriétaires, l’angoisse est également palpable. Selon une étude de l’INSEE, rappelle le Figaro, deux tiers d’entre eux en ont besoin pour rembourser l’emprunt de l’achat du logement loué.
Parmi les locataires, de nombreuses catégories risquent lors de cette nouvelle vague, de ne plus avoir de revenus – auto-entrepreneurs, indépendants… Leur statut ne leur permettent pas de bénéficier du chômage partiel.
Quelles aides pour payer son loyer ?
Avant qu’il ne soit trop tard, n’hésitez pas à vous adresser à l’Adil. L’agence pourra, au vu de votre situation, vous orienter pour bénéficier des aides auxquelles vous avez droit.
En terme d’aides, le gouvernement prolonge l’aide exceptionnelle d’Action Logement instituée en juin dernier. Elle s’adresse aux demandeurs d’emploi et aux salariés du secteur privé ayant connu une baisse de revenus d’au moins 15%. Ils peuvent demander une aide de 150 € renouvelable une fois. Les salariés et demandeurs d’emploi saisonniers du secteur agricole peuvent la percevoir durant 3 mois, pour un montant total de 600 €.
Le 24 octobre dernier, le gouvernement annonçait la pérennisation de cette aide. Il prévoit son assouplissement afin d’en faire bénéficier les plus précaires dès le début de l’année 2021. Son montant pourrait également être rehaussé.
Les aides existantes
Dans tous les cas, renseignez-vous auprès de la CAF. Vous avez peut-être droit aux APL dont l’obtention dépend de vos revenus. Hors APL, si vous bénéficiez de prestations familiales, peut-être êtes-vous éligible à l’Allocation de Logement Familiale (ALF) ? Ou encore à l’Allocation de Logement Sociale ?
Si votre employeur est assujetti au 1% Logement, vous pouvez également prétendre aux aides d’Action Logement. Cela fonctionne même si vous êtes au chômage et si votre dernier employeur l’était.
Le dispositif Visale vous concerne si vous avez moins de 30 ans ou êtes salarié du secteur privé en mobilité. Si vous y avez souscrit en signant votre bail, il peut régler au propriétaire jusqu’à 9 mois de loyer en cas de défaillance du locataire.
Enfin, vous pouvez contacter un travailleur social afin d’obtenir une aide du Fonds de Solidarité pour le Logement. Ce dernier intervient en cas de difficultés importantes à régler le loyer ou les charges (dettes de loyer, factures d’énergie, d’eau, etc…)
Trouver un accord avec votre bailleur
C’est l’une, voire la première mesure à prendre. Si vous voyez que la situation se tend, contactez votre bailleur ou votre propriétaire. Il s’agit de chercher ensemble un accord, par exemple sous la forme d’un étalement du paiement de votre loyer. D’une manière générale, il est en effet plus constructif de trouver un accord avant qu’il ne soit trop tard. A éviter absolument : fuir ses responsabilités, et laisser la situation empirer. Trêve hivernale ou pas, votre propriétaire a le droit d’engager des poursuites judiciaires qui, à terme, risquent d’aboutir à l’expulsion.
Pour éviter la crise à venir, des voix s’élèvent pour obtenir un moratoire aussi bien sur le paiement des loyers que sur le remboursement des emprunts, le temps que la crise actuelle passe.
C’est l’option adoptée par l’Allemagne et l’Espagne. En France, le moratoire sur les loyers pour le moment n’est prévu que pour les entreprises.
Repenser les règles du logement
Bailleurs et locataires en sont conscients : la crise à venir va être complexe à gérer. Henry Buzy-Cazaux, président de l’Institut du Management des Services Immobiliers, dans une récente tribune, appelle le gouvernement à prendre des mesures fortes et notamment « que le mandat de garantie totale créé par la proposition de loi Nogal soit voté sans délai …. Qu’est-ce qui justifie encore qu’on repousse ce progrès législatif, au moment précis où les locataires souffrent et où leurs bailleurs vont pâtir de la situation ? Pour les copropriétés, le développement de la certification QualiSR, de nature à faire émerger des compétences de syndics aptes à prévenir les difficultés, à accompagner les ménages désolvabilisés et fragilisés, est une solution. Il en faudra sur tout le territoire, parce que la situation des familles se dégrade déjà et que ce n’est qu’un début. »
La question de l’examen des dossiers des candidats au logement ne doit plus passer uniquement par le montant de leur salaire et la multiplicité de leurs garants. C’est le moyen idéal d’ostraciser les plus faibles, et de favoriser le mal-logement. Une autre donnée est à prendre en compte : le reste à vivre ! Il s’agit des moyens qui reste à un foyer une fois déduits de son revenu les charges incompressibles (loyer, électricité, chauffage, crédit….).
De nouvelles formes de logements
Il est également nécessaire d’encourager les nouvelles manières d’habiter : habitats partagés qui, soutenu par les bailleurs sociaux proposent de plus en plus souvent des logements sociaux et limitent les coûts de construction. Mais aussi la co-location qui permet de réduire les frais de logement et d’assurer une meilleure qualité de vie aux colocataires.
Si l’on considère que toute crise peut donner naissance à des opportunités, c’est aujourd’hui l’occasion de prendre des décisions justes et constructives ; des décisions qui ne mettent pas en péril les bailleurs, notamment privés. C’est l’occasion de transformer cette crise sociale qui s’annonce en une réponse efficace à la crise du mal-logement !
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Crédit photo: Samuel McGinity